La Boîte de Pandore reste fermée

Par Nizar BAHLOUL

Hannibal TV a donc décidé d’ouvrir un débat autour de la corruption dans le sport. Sujet délicat et tabou. Parmi ce qu’il y a de plus tabou chez nous (Cliquer ici pour lire notre article à ce sujet).
Au lendemain de la diffusion de l’émission, mardi 18 mars, je m’attendais à ce qu’il y ait des réactions de la part des équipes, de la Fédération, de la Ligue. Mais rien ne s’est passé. Comme si Hannibal TV diffuse sur une autre planète et comme si le sujet touche Tombouctou et non la Tunisie.

De deux choses, l’une : c’est soit que tout le monde n’est pas concerné et a donc estimé pouvoir zapper le sujet partant du principe « chez moi tout le monde est propre ». C’est soit que tout le monde ait, au contraire, quelque chose à se reprocher et se cache pour ne pas ouvrir la Boîte de Pandore.
Si c’est le premier cas, Ben Gharbia and co sont en mal de sujets et en ont inventé un !
Si c’est le second cas, l’équipe de la chaîne privée aura perdu son temps et n’a fait que reprendre devant la caméra ce que tout un chacun sait.
Dans un cas comme dans l’autre, les analyses et « leçons » n’ont servi à rien. A quoi en effet cela sert-il de débattre, d’attirer l’attention, d’alerter et de proposer des solutions, si rien ne se passe ensuite ?

Tout le monde est d’accord pour dire que la corruption est un mal endémique. Que la corruption est un moyen pour casser les règles et les lois que la communauté a mises pour vivre ensemble en bonne intelligence. D’après les échos qui nous parviennent du monde sportif (le foot spécialement), il semblerait que la gangrène soit là et bien là. Les parlottes de café ont été reprises par d’éminents spécialistes qui n’ont pas spécialement la réputation de colporter les rumeurs. Il n’y a pas de fumée sans feu. Or il semblerait que l’on ait dépassé le stade de la fumée et que le feu commencerait à bien se montrer. On exagère ? Peut-être ! Après tout, l’argument brandi par tous est l’absence de preuves. Et ni Hannibal, ni les clients de cafés, ni les fans n’ont de preuves tangibles. Seulement voilà, tout le monde est d’accord pour relater des faits jamais avérés. En face, tout le monde semble s’y plaire puisque chacun y trouve son compte. D’où le silence. Or c’est là, la gravité.

Entre un corrupteur et un corrompu, il est évident que les deux parties trouvent leur compte. Le mal est dans tout le reste. Que l’équipe A soudoie l’équipe B, bien leur en fasse, elles ne se font pas de mal (à court terme). Au contraire. Mais ce sont les équipes C, D, E, F, G…. qui sont lésées par les agissements de A et B. Et toutes ces équipes, si elles ne sont pas elles-mêmes corruptrices et corrompues, se doivent de réagir pour arrêter le mal engendré par A et B. Et si ces équipes sont à leur tour corrompues, c’est à la FTF de réagir. Et si cette dernière refuse de réagir (parce que nous ne serions pas prêts à affronter un tel problème, aurait dit l’un de ses dirigeants), c’est à la Justice de réagir.

Quel que soit le mal que déclencherait un ou des scandales de corruption, la relégation de prestigieuses équipes en division inférieure, le bannissement ou l’emprisonnement de dirigeants, tout ce mal là est inférieur au mal du silence actuel. Si la Boîte de Pandore s’ouvre, cela va faire mal. Certes. Mais si elle reste fermée, c’est pire. On a mal lors d’une opération chirurgicale, mais on est nettement mieux ensuite !