Heure de Tunis :
Plus de prévisions: Meteo 25 jours Paris
Light
Dark

La Tunisie au regard du département d’État américain


La situation en Tunisie est devenue depuis plusieurs mois l’un des sujets phares des débats animant la scène internationale. Plusieurs pays ont exprimé leurs inquiétudes quant à l’effondrement de l’économie tunisienne et à la réinstauration d’une dictature.


Les critiques au régime tunisien se sont fortement accentuées en raison des récents développements dans le pays. Plusieurs opposants au président de la République, Kaïs Saïed, ont été arrêtés et jetés en prison depuis le 11 février 2023. Ils sont accusés de trahison et de complot contre la sûreté de l’État. Ces accusations ont souvent été évoquées par le chef de l’État. Ce dernier considère qu’il est le seul politicien ayant fait preuve d’intégrité et de patriotisme, selon les déclarations de Christopher Murphy, sénateur et président du sous-comité du Sénat américain pour le Proche-Orient, l\’Asie du sud, l\’Asie centrale et le contre-terrorisme.

Le sénateur a indiqué, lors d’une audition consacrée à la situation en Tunisie, avoir décelé les traits d’un despote chez Kaïs Saïed. Il est parvenu à ce constat à la suite d’une rencontre du mois d’août de l’année 2021. « Il a adopté un discours conspirationniste… À la fin de cette rencontre, j’étais certain que la Tunisie avançait dans la mauvaise direction… Kaïs Saïed a suivi le manuel du dictateur… Il a adopté une nouvelle constitution consolidant ses prérogatives… Il a arrêté des membres de l’opposition… Il ne s’agit pas d’actes d’un leader cherchant à mettre en place un nouveau modèle de démocratie », a-t-il ajouté.

Christopher Murphy a fortement critiqué l’attitude de Kaïs Saïed. Il a mis l’accent sur plusieurs mesures et décisions déplaisantes. Le sénateur a considéré que son pays n’avait pas à soutenir le président tunisien par peur de le voir s’adresser à la Chine comme alternative économique. Il a, par la suite, laissé la parole au sénateur Todd Young. Ce dernier a, lui aussi, déploré la politique du système en place et a souhaité voir une réaction de la part de l’administration américaine. Il a estimé que de petites réductions de l’aide budgétaire n’étaient pas suffisantes.


La parole a été donnée au sous-secrétaire d\’État adjoint pour l\’Afrique du Nord, Joshua Harris. Ce dernier a mis l’accent sur les risques d’effondrement de l’économie nationale et l’impact d’un tel événement sur l’intégralité de la région. Il a estimé que le gouvernement tunisien avait proposé un programme de réformes vigoureux, mais que le président de la République, Kaïs Saïed avait décidé de s’y opposer. L’effondrement de l’économie, selon le haut-cadre américain, s’oppose à l’idée d’une gouvernance démocratique. Ceci s’oppose aux intérêts américains. Il a expliqué que les USA étaient prêts à soutenir la Tunisie dans l’application des réformes, mais que la conclusion d’un accord avec le FMI était une décision souveraine que seul Kaïs Saïed était habilité à prendre.

« Parallèlement à la crise économique, la Tunisie connaît de profonds changements politiques. Une consolidation du pouvoir exécutif a été normalisée à travers un référendum marqué d\’une faible participation des électeurs. Le pouvoir judiciaire a été soumis à des pressions considérables en raison des arrestations et des poursuites engagées à l\’encontre de ceux qui sont perçus comme des critiques du gouvernement. Des chefs d\’entreprise, des militants politiques et des journalistes ont été témoins, au cours des 21 derniers mois en Tunisie, d\’une érosion alarmante des normes démocratiques », a-t-il ajouté.

Joshua Harris a considéré que l\’arrestation d\’opposants politiques était en opposition directe avec la constitution tunisienne garantissant la liberté d\’opinion et d\’expression. Il a estimé que les relations tuniso-américaines pouvaient se renforcer en cas de respect commun des principes de la démocratie et des fondements de la liberté. Il a expliqué que le département de l\’État révisait continuellement les questions d\’ordres diplomatiques, notamment les programmes d\’assistance et d\’appui. Ceci a conduit à un rééquilibrage et à une réduction de 65% du budget attribué à la Tunisie au titre de l\’année 2024.

Réagissant aux remarques et aux questions émises par les sénateurs, Joshua Harris a affirmé qu\’il partageait leurs points de vue quant à la consolidation des pouvoirs par le chef de l\’État. Il a indiqué que le secrétaire d\’État, Antony Blinken, a demandé la réduction de moitié du budget d\’aide à la Tunisie. Cette mesure concerne tous les domaines y compris celui de la sécurité.


L’administratrice adjointe du programme USAID, Megan Doherty, a, aussi, été auditionnée par le sous-comité américain. Elle a considéré que le futur de la Tunisie était de plus en plus incertain. Elle a considéré que la démocratie et les libertés fondamentales des Tunisiens étaient en danger. Elle a, aussi, évoqué la crise économique que le pays traversait. Évoquant un récent sondage, elle a expliqué que plus de 70% des Tunisiens croyaient que la démocratie était la meilleure forme de gouvernance existante. Elle a indiqué que l’USAID a décidé, en raison des atteintes à la démocratie, de collaborer directement avec la société civile.

Megan Doherty est revenue sur la hausse des prix et l’insécurité alimentaire en Tunisie. Elle a expliqué que l\’USAID a soutenu plus de 44.000 petites entreprises tunisiennes. Ceci leur a permis de créer plus de 48.000 emplois dont les deux tiers sont occupés par des femmes. Megan Doherty a estimé que la dissolution du parlement et des conseils municipaux portait atteinte aux libertés. Face aux arrestations politiques, la société civile tunisienne a fait preuve de courage et continue à faire face aux menaces croissantes. L’agence américaine continuera, selon elle, à soutenir les Tunisiens œuvrant pour la garantie de la stabilité économique du pays et défendant la démocratie et les libertés.


Tout au long de l’audition, les représentants de l’administration américaine et les sénateurs ont critiqué la politique de Kaïs Saïed. Ils ont multiplié les remarques évoquant une régression aux niveaux économique et politique. Les USA semblent vouloir opter pour une politique reflétant son mécontentement quant à la situation en Tunisie. Nous allons sûrement faire face à une série de mesures reflétant clairement cela.

 

 

Sofiene Ghoubantini

Subscribe to Our Newsletter

Keep in touch with our news & offers