L’Ordre national des avocats a tenu, vendredi 12 septembre 2025, son assemblée générale ordinaire pour l’année judiciaire 2024-2025. À cette occasion, le bâtonnier Hatem Mziou a dressé un état des lieux marqué par de nombreuses difficultés structurelles, au premier rang desquelles la situation critique de la Caisse sociale de l’Ordre et les problématiques liées aux pensions de retraite.
Hatem Mziou a rappelé que le Conseil de l’Ordre avait soumis aux autorités plusieurs propositions de réforme afin de garantir la pérennité du système de couverture sociale des avocats et d’assurer une retraite digne à ses membres. « Toutefois, ces propositions ont été rejetées par le gouvernement, en particulier par la ministre de la Justice et la ministre des Finances », affirme-t-il. Selon Me Mziou, ce refus s’explique moins par des raisons techniques ou budgétaires que par « les positions politiques prises par l’Ordre au cours de l’année écoulée, notamment après l’arrestation de l’avocat Ahmed Souab ».
Face à ses confrères, le bâtonnier a défendu son rôle de représentant de la profession :
« J’ai toujours été présent aux côtés de mes collègues poursuivis en justice, sans aucune exception. Dans toutes les affaires, à tous les stades de la procédure, j’ai assumé ma responsabilité en tant que bâtonnier ».
Par ce discours, Hatem Mziou a cherché à se présenter comme le garant de la solidarité interne et de la défense des droits des avocats, affirmant que l’Ordre n’a jamais failli à sa mission, malgré les tensions avec les autorités.
Ces déclarations n’ont toutefois pas convaincu tout le monde. Lors de l’assemblée, un message d’Ahmed Souab, lu par son confrère Fadi Snan, a marqué les débats. L’avocat, actuellement emprisonné, y accuse la direction de l’Ordre d’avoir failli à ses responsabilités :
« Le bâtonnier actuel a abandonné son rôle, affaiblissant l’Ordre face aux violations et ouvrant la voie au démantèlement de l’indépendance de la profession. Une direction qui renonce à ses principes condamne le barreau à la décadence, réduit la défense des droits à de simples mots sans action et transforme la profession en une dépouille livrée au pouvoir ».
À ces accusations, se sont ajoutées d’autres contestations, dont celle de l’avocate Ines Harrath. Dans une publication au ton ironique, elle a mis en doute la sincérité des propos de Hatem Mziou :
« Peut-être ai-je perdu la mémoire… Car je n’arrive pas à me souvenir que notre bâtonnier ait plaidé dans toutes les affaires, à tous les stades, pour tous les collègues emprisonnés, ni qu’il ait sans relâche défié les violations des autorités. Si tel avait été le cas, l’Ordre ne serait pas aujourd’hui marginalisé, mais au contraire reconnu pour ses réussites ».

Entre la défense d’un bilan que Hatem Mziou présente comme celui de la constance et de la solidarité, et les critiques de ses opposants qui l’accusent de compromission et d’affaiblissement, l’assemblée générale de l’Ordre national des avocats a mis en lumière une fracture profonde. Celle-ci reflète un débat de fond : le rôle de l’Ordre doit-il être celui d’un partenaire institutionnel ou d’un contre-pouvoir face aux dérives de l’État ?
S.H.










