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Indignation en ligne après la suspension de l’Association tunisienne des femmes démocrates

Manifestation à Tunis pour la défense des droits des femmes

Par Myriam Ben Zineb

La décision de suspendre pour un mois les activités de l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD) continue de provoquer un vaste mouvement d’indignation. Militants, organisations et citoyens y voient une attaque frontale contre les libertés publiques et contre un symbole historique du féminisme tunisien.

Les militants de l’ATFD ont dénoncé une « décision politique » et une « grave atteinte au mouvement féministe », rappelant que toutes les remarques formulées par la présidence du gouvernement en 2024 avaient été levées dans les délais légaux. « Malgré le respect des procédures et la conformité au cadre juridique, la décision de suspension est tombée comme une sanction arbitraire », écrivent les militants de l’association, évoquant une tentative de « museler les voix libres ».

En quelques heures, les réseaux sociaux se sont transformés en tribune de colère et de solidarité.
« Vive l’Association tunisienne des femmes démocrates. Vive la femme tunisienne libre et forte ! » a publié Ramla Dahmani Accent, tandis que l’avocat Nafaâ Laribi ironisait : « Et la cerise sur le gâteau : une décision médiévale de suspendre l’activité de l’ATFD ! Le démantèlement se poursuit, à moins qu’il ne s’agisse du démantèlement du pays lui-même ! ».

D’autres publications ont lié cette mesure à une stratégie politique plus large : « La suspension de l’ATFD, la fuite d’informations sur le ciblage de dizaines d’associations et la fixation, en catimini, de l’audience en appel dans l’affaire du complot ont un objectif clair : détourner l’attention de la crise sociale et environnementale à Gabès », peut-on lire dans un message de Hichem Ajbouni.

La Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’Homme (LTDH) a réagi avec fermeté, exprimant sa « solidarité totale et son soutien inconditionnel » à l’ATFD. Pour la Ligue, cette décision représente « une violation grave de la liberté d’association » et une « atteinte à l’indépendance du mouvement féministe et de la société civile ».« Faire taire les voix féministes libres ne passera pas », a affirmé la LTDH, soulignant que l’association, active depuis plus de trente ans, a toujours été une « voix libre et un défenseur acharné des droits des femmes, de l’égalité et de la justice sociale ».

Le Forum des droits économiques et sociaux (FTDES), a lui aussi exprimé samedi sa « pleine solidarité », dénonçant une « criminalisation de l’action civile ». Selon un communiqué du FTDES, « ces mesures sont politiques : elles visent les associations indépendantes et envoient un message d’intimidation aux autres composantes de la société civile. ».

Plusieurs militantes historiques ont également pris la parole, exprimant leur colère mais aussi leur fidélité à l’esprit de l’association.
« Aujourd’hui, la suspension de l’ATFD a été annoncée. C’est dans cette association que j’ai appris la véritable signification de la solidarité, celle d’être aux côtés d’une femme battue, et que le combat pour la liberté et l’égalité est avant tout une position, pas un slogan », a écrit l’avocate Hamida Chaieb.

« Nous avons porté les souffrances et les espoirs des femmes sans relâche. Nous ne rêvions pas pour nous-mêmes, mais pour chaque femme effrayée, pour chaque fillette qui mérite un avenir sans violence. La suspension de l’ATFD ne gèlera pas l’idée, ni n’éteindra l’esprit qu’elle a allumé », poursuit-elle, concluant par un message de résistance : « Nous continuerons à croire, à écrire, à défendre les femmes et à rêver… comme l’association nous l’a appris ».

Fondée en 1989, l’ATFD est l’une des principales organisations féministes en Tunisie. Elle accueille chaque année plusieurs centaines de femmes victimes de violences à travers ses centres d’écoute et d’orientation implantés dans différentes régions du pays.

Face à la colère grandissante, l’association a annoncé son intention de saisir la justice pour faire annuler cette décision qu’elle juge « injuste et infondée ». En attendant, les messages de soutien se multiplient : pour beaucoup, suspendre l’ATFD, c’est s’en prendre à toute une génération de femmes libres et à un pan essentiel de la société civile tunisienne.

M.B.Z

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