La ministre des Finances, Mechket Slama Khaldi, a annoncé, jeudi 30 octobre 2025, lors d’une réunion conjointe des commissions des finances des deux chambres du Parlement, que la Tunisie envisage de recourir de nouveau au marché financier international à travers un emprunt obligataire d’environ 400 millions d’euros, soit près de 1,4 milliard de dinars, et ce pour la première fois depuis 2019.
Elle a expliqué que ce retour s’inscrit dans une stratégie de financement mesurée, précisant que l’État se réserve le droit de refuser toute condition qui ne serait pas conforme à ses intérêts économiques et financiers. Cette orientation traduit la volonté du gouvernement de diversifier les sources de financement tout en préservant la souveraineté budgétaire du pays.
Selon les données du projet de loi de finances 2026, la Tunisie prévoit de mobiliser une part importante de ses ressources à travers des emprunts intérieurs et extérieurs. Parmi ces financements figurent des prêts d’appui budgétaire provenant de plusieurs institutions internationales, dont le Fonds monétaire arabe, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement, la Banque africaine d’import-export (Afreximbank) et l’Agence française de développement, ainsi que d’autres partenaires financiers.
Les documents budgétaires indiquent également que le gouvernement envisage de bénéficier de facilités directes auprès de la Banque centrale de Tunisie, remboursables sur le long terme et sans intérêt. Une convention doit être conclue entre la ministre des Finances et le gouverneur de la Banque centrale, Fethi Zouheir Nouri, pour fixer les modalités de mise en œuvre de ces facilités. Parallèlement, une part significative des ressources mobilisées sera consacrée au remboursement de la dette publique intérieure et extérieure.
Ce retour envisagé sur le marché international intervient après plusieurs années d’interruption, marquées par la détérioration de la note souveraine de la Tunisie et la suspension des discussions avec le Fonds monétaire international. Depuis 2022, les autorités tunisiennes privilégient une approche fondée sur la réduction du recours à l’endettement extérieur et la limitation de la dépendance aux institutions financières internationales, conformément à l’orientation prônée par le président de la République, Kaïs Saïed.
La situation financière du pays a toutefois connu une amélioration sensible en 2025, soutenue par un redressement des équilibres budgétaires et une meilleure gestion de la dette. Les récentes décisions des agences de notation internationales ont d’ailleurs reflété cette évolution : Moody’s a relevé la note de la Tunisie, estimant que les efforts entrepris par le gouvernement et la Banque centrale pour stabiliser les réserves en devises et réduire progressivement le déficit renforcent la crédibilité financière du pays. De son côté, Fitch Ratings a également amélioré la notation souveraine de la Tunisie tout en maintenant une perspective stable, soulignant que la situation budgétaire demeure fragile mais en voie de consolidation.
Cette évolution ouvre la voie à un retour prudent sur les marchés internationaux, que le gouvernement présente comme un signal de confiance envers la trajectoire financière du pays et sa capacité à honorer ses engagements, tout en veillant à limiter les risques liés à l’endettement.
La dernière émission obligataire internationale de la Tunisie remonte à 2019. À cette date, le pays avait réussi à lever 700 millions d’euros sur les marchés internationaux, à un taux d’intérêt de 6,375 % et sur une maturité de sept ans. Cette opération, sursouscrite plus de trois fois par les investisseurs, visait à répondre aux besoins de financement du budget 2019, estimés à environ dix milliards de dinars. Il s’agissait alors d’un recours jugé indispensable pour combler le déficit et soutenir la trésorerie de l’État, dans un contexte de pressions financières importantes.
M.B.Z










