Le journaliste Zied El Heni a adressé, ce vendredi 7 novembre 2025, une lettre ouverte à l’opposant politique Jaouhar Ben Mbarek, actuellement en grève de la faim sauvage à la prison de Belli. Tout en saluant son engagement pour la défense de la démocratie et son opposition au processus instauré par le président de la République Kaïs Saïed, il l’appelle à mettre fin à la grève, estimant qu’elle constitue « une défaite » et qu’elle inflige une douleur insoutenable à ses proches, notamment à son père, l’ancien militant Ezzeddine Hazgui, et à sa sœur, l’avocate Dalila Ben Mbarek.
Zied El Heni reconnaît la colère et la détermination de Jaouhar Ben Mbarek, emprisonné depuis près de trois ans dans le cadre d’une « affaire politique ». Mais il estime que « l’abandon du corps n’est pas un acte de résistance » et exhorte l’opposant à « se relever » et à ne pas céder au désespoir : « Le militant ne se rend pas, même lorsque tout semble perdu », écrit-il.

Un état de santé alarmant
Cette lettre intervient alors que les alertes se multiplient autour de la santé de Jaouhar Ben Mbarek.
Jeudi 6 novembre 2025, l’avocat Karim Marzouki a indiqué à l’issue d’une visite à la prison de Belli que l’état de santé de l’opposant est désormais « très affaibli ».
Jaouhar Ben Mbarek mène depuis le 29 octobre une grève de la faim sauvage, c’est-à-dire sans nourriture, sans eau et sans médicaments.
« Ma décision est définitive, il n’y aura pas de retour en arrière », aurait-il murmuré, ajoutant : « J’aime la vie, mais j’aime la vie qui a un sens, pas une vie absurde. »
La journaliste Monia Arfaoui a évoqué un « choc » à la lecture du témoignage de l’avocat, rappelant l’image d’un homme « débordant d’énergie, d’argumentation et de mouvement ».
« Ta vie compte, Jaouhar. Pour ton père, tes enfants, ta sœur… et pour nous », a-t-elle écrit.
Alertes des organisations de défense des droits humains
La Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH) avait déjà exprimé sa « profonde inquiétude » et dénoncé une « indifférence volontaire » des autorités, qu’elle tient « pleinement responsables » de son intégrité physique. Elle appelle à son transfert urgent vers une structure médicale et à l’arrêt de la politique du déni.
Amnesty International Tunisie a, de son côté, publié un communiqué jeudi 6 novembre 2025, exprimant sa vive préoccupation face à la situation sanitaire « critique » du militant.
L’ONG rappelle qu’il mène cette grève pour protester contre ce qu’elle qualifie d’arrestation arbitraire et de condamnation injuste dans l’affaire dite du complot contre la sûreté de l’État.
Amnesty appelle à :
• sa libération immédiate et inconditionnelle,
• ainsi qu’à celle de tous les détenus d’opinion,
• et exhorte les autorités tunisiennes à respecter leurs engagements internationaux en matière de droits humains.
« Le droit de manifester et de s’exprimer librement est un pilier de tout État de droit », insiste l’ONG.
Une situation décrite comme « critique »
L’avocat Samir Dilou avait déjà alerté sur une situation « extrêmement critique », affirmant que Jaouhar Ben Mbarek est désormais « aux portes de la mort ».
Son père, Ezzeddine Hazgui, continue de dénoncer une « responsabilité directe » des autorités et considère la grève comme « un acte de résistance politique ».
Un appel à suspendre la grève
Dans ce contexte, l’appel de Zied El Heni apparaît comme un plaidoyer pour la vie.
Il exhorte Jaouhar Ben Mbarek à ne pas se laisser consumer par la violence de la lutte : « Ton combat n’est pas terminé. Debout, c’est ainsi que tu les affrontes ».
M.B.Z












