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COP30 : comment les climatosceptiques tentent d’influencer le débat, vérification des faits à l’appui

À l’ouverture de la COP30 au Brésil, les réseaux sociaux et plusieurs figures publiques ravivent une vieille mécanique qui consiste à semer le doute sur la science du climat. De Donald Trump à certains plateaux télé français, en passant par des influenceurs météo et des chercheurs américains qualifiés de « contrariants», la désinformation climatique circule à grande vitesse. Elle touche le débat international, mais aussi la Tunisie, où certains comptes reprennent ces narratifs sans vérification.

En France, la polémique a été tranchée par la justice. Déboutée par le Conseil d’État, la chaîne CNews a été condamnée à 20.000 euros d’amende pour avoir diffusé des propos minimisant scientifiquement le rôle de l’activité humaine dans le réchauffement. Les régulateurs ont estimé que la chaîne avait manqué à son obligation d’honnêteté de l’information. Pascal Praud, animateur de l’émission « L’Heure des Pros », a donné à plusieurs reprises la parole à des intervenants climatosceptiques sans apporter de correction scientifique à leurs propos. En janvier 2022, l’antenne diffuse ainsi l’intervention du géophysicien retraité, Christian Gerondeau, affirmant que le CO₂ n’a « aucune influence » sur le climat, que « le réchauffement observé est naturel » et que « l’élévation du niveau des mers n’existe pas » des propos parus dans son livre « Climat : l’effet rideau noir« .

Ces affirmations sont contredites par toutes les académies scientifiques internationales. Le CO₂ est bel et bien responsable du réchauffement climatique, et cela repose sur trois preuves incontournables. D’abord, la physique le démontre depuis le 19e siècle le CO₂ retient la chaleur en absorbant le rayonnement infrarouge. Ensuite, les mesures modernes, des satellites aux stations météorologiques, montrent que la Terre se réchauffe précisément aux longueurs d’onde absorbées par le CO₂.

Dans une autre émission de mars 2023, le chroniqueur Ivan Rioufol avance que « l’homme n’a aucune preuve d’être responsable du réchauffement climatique », reprenant les arguments de figures climatosceptiques américaines. Aucune précision scientifique n’a été fournie à l’antenne pour corriger ces propos. Enfin, l’augmentation rapide du CO₂ dans l’atmosphère provient clairement de la combustion du charbon, du pétrole et du gaz, ce que confirment les analyses isotopiques.

Preuves, études du GIEC, données de la NASA et de la NOAA étaient pourtant disponibles et contredisaient clairement les propos relayés. Le signal est fort la désinformation climatique n’est plus seulement un débat d’opinion, elle devient un enjeu juridique.

Des rapports climatosceptiques

C’est également outre-Atlantique que surgit un autre foyer de désinformation. Un rapport publié le 23 juillet 2025, commandé par le Département de l’Énergie américain (Department of Energy) et signé par John Christy, Judith Curry, Roy Spencer, Ross McKitrick et Steven Koonin, avance que les modèles climatiques «surestiment» le réchauffement et que les effets seraient en partie «bénéfiques». Ces conclusions sont rejetées par la communauté scientifique pour plusieurs raisons factuelles. Les soi-disant «effets bénéfiques» du CO₂ ne compensent pas les impacts comme la pertes agricoles dues aux vagues de chaleur, acidification des océans, effondrement de la biodiversité, multiplication des catastrophes naturelles. Le rapport a été critiqué pour conflits d’intérêts, méthodologie sélective et omission de données clés, notamment celles des agences fédérales américaines.

Trump relance son discours climatosceptique à l’ONU

Dans un discours prononcé aux Nations Unies, Donald Trump a qualifié le changement climatique de «plus grande arnaque» et traité les scientifiques du climat de «stupid people». Les affirmations du président américain ne correspondent à aucun fait observable les années 2023, 2024 et 2025 figurent parmi les plus chaudes jamais enregistrées . Les coûts économiques des catastrophes climatiques augmentent chaque année, dépassant les 250 milliards de dollars en 2024 .

Sur X, le narratif «COP30 = taxes = racket»

Le compte français @Meteo60 a diffusé un tweet devenu viral  «COP30 = taxes = racket (et bon business pour certains)». Ce narratif, très répandu dans la sphère complotiste européenne, s’appuie sur une fausse idée que la COP imposerait des taxes mondiales. C’est factuellement faux. Les COP ne créent ni lois ni taxes. Elles adoptent des orientations politiques. Les contributions climatiques, telles que le Fonds pour les pertes et préjudices, reposent sur la volonté des États, pas sur des prélèvements obligatoires.

En Tunisie, plusieurs pages Facebook et comptes TikTok ont repris ce slogan, parfois mot pour mot, sans vérifier qu’il s’agit d’une désinformation structurée d’origine étrangère.

Quand même des prix Nobel sont détournés pour tromper

Certaines citations attribuées à des prix Nobel de physique, notamment John Clauser, sont utilisées pour prétendre que «CO₂ et méthane ont un effet négligeable sur le climat». Ces déclarations sont scientifiquement fausses. Les gaz à effet de serre ont un rôle démontré depuis le 19e siècle, et la physique atmosphérique moderne le confirme.

Toutes réfutent les analyses de Clauser, jugées méthodologiquement erronées et contraires à des siècles de mesures observationnelles.

Un climat de désinformation qui touche aussi la Tunisie

En Tunisie, les narratifs climatosceptiques sont encore minoritaires, mais commencent à circuler via des pages populaires qui reprennent des contenus américains ou français. On voit notamment «Le climat a déjà toujours changé» , «La COP sert seulement à taxer les peuples», «Les catastrophes ne sont pas liées au changement climatique»

Ces affirmations sont scientifiquement fausses. Le pays connaît déjà un réchauffement plus rapide que la moyenne mondiale et des sécheresses qui affectent l’agriculture, l’eau et les écosystèmes, comme le montre le rapport de la banque mondiale.

À l’ouverture de la COP30

Ce cycle de désinformation est devenu un phénomène mondial structuré. Il combine intérêts politiques, plateformes influentes et algorithmes de réseaux sociaux qui amplifient les contenus polarisants. Alors que la communauté internationale se réunit au Brésil pour une COP cruciale, la bataille pour l’information fiable devient aussi essentielle que la lutte contre les émissions.

La science, elle, reste claire : le climat change, l’humain en est la cause principale, et agir est non seulement possible, mais nécessaire pour protéger des millions de vies.

R.A.

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