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Mohamed Salah Ayari détaille la logique de l’impôt sur la fortune, tout en exprimant ses réserves

Mercredi 12 novembre 2025, l’enseignant universitaire, conseiller fiscal et membre du Conseil national de la fiscalité Mohamed Salah Ayari est revenu en détail sur l’instauration d’un impôt sur la fortune inscrite dans le projet de Loi de finances 2026 (PLF 2026), une mesure présentée par le gouvernement comme un levier de justice fiscale.

Selon lui, cette taxe n’est pas totalement nouvelle. « L’impôt sur la fortune a déjà été introduit pour la première fois en Tunisie à travers la Loi de finances 2023, mais sous la forme d’un impôt sur la fortune immobilière », a rappelé Mohamed Salah Ayari, dans une interview téléphonique au micro de Nabila Abid dans l’émission Yaoum Saïd sur la Radio Nationale. À l’époque, cet impôt concernait les personnes détenant un patrimoine immobilier d’une valeur égale ou supérieure à trois millions de dinars, taxé à hauteur de 0,5%, et s’appliquait uniquement aux biens immobiliers.

Le fiscaliste explique que le nouvel article 50 du PLF 2026 élargit désormais cette taxe à l’ensemble des éléments de richesse, au-delà des seuls biens immobiliers.

« On ne parle plus de fortune immobilière, mais de fortune tout court », précise-t-il. « Sont désormais concernées les valeurs mobilières, les fonds déposés dans les banques, les institutions financières et le courrier tunisien, ainsi que les revenus de capitaux mobiliers tels que les dividendes ou les intérêts générés par les placements financiers. »

La nouvelle version du texte prévoit deux seuils d’imposition :

  • de trois à cinq millions de dinars, le taux est fixé à 0,5% ;
  • au-delà de cinq millions de dinars, le taux passe à 1%.

La déclaration annuelle doit être déposée avant le 30 juin de chaque année, précise-t-il, et les biens utilisés dans un cadre professionnel — tels que les locaux d’entreprises ou les actifs inscrits au bilan — ne sont pas soumis à cette taxe.

Mohamed Salah Ayari souligne que la résidence principale du contribuable ne sera pas prise en compte dans le calcul de la valeur globale du patrimoine, de même que les biens immobiliers utilisés pour une activité professionnelle.

Quant aux véhicules, il précise que seuls les véhicules de tourisme dépassant douze chevaux fiscaux seront soumis à l’impôt, les véhicules utilitaires étant exclus.

La taxe s’applique aussi bien aux Tunisiens résidant dans le pays qu’à ceux établis à l’étranger, dès lors que leurs biens sont situés en Tunisie. Cependant, les conventions internationales de non-double imposition — actuellement au nombre de 57, selon le conseiller — continueront de s’appliquer pour éviter qu’un même bien ne soit imposé deux fois.

S’agissant de l’efficacité de cette mesure, Mohamed Salah Ayari émet des réserves : « Nous n’avons pas encore de chiffres clairs sur le rendement de la taxe sur la fortune immobilière instaurée en 2023. Rien ne prouve qu’elle ait généré des recettes significatives. »

Il estime par ailleurs que le système fiscal tunisien dispose déjà d’outils permettant de taxer les personnes dont le niveau de vie ne correspond pas à leurs déclarations.

« Le code actuel prévoit des articles, comme les articles 42 et 43 du Code de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et de l’impôt sur les sociétés, qui permettent d’ajuster la taxation en fonction du niveau de vie réel : propriété d’un logement secondaire, possession de véhicules de luxe, piscines, yachts, voyages de loisir, etc. Ces mécanismes suffisent pour corriger les écarts sans créer une nouvelle taxe. »

Le conseiller fiscal conclut en plaidant pour une approche plus pragmatique : « Au lieu d’introduire un nouvel impôt qui risque de complexifier encore la fiscalité, il vaut mieux renforcer les contrôles existants et encourager les détenteurs de richesse à investir dans l’économie réelle et à créer des emplois. L’objectif doit rester la justice fiscale, mais aussi la stimulation de l’investissement. »

I.N.

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