Houssem Bounenni, vice‑président du Conseil national de l’Ordre des Comptables de Tunisie (CCT), dresse, ce mercredi 10 décembre 2025, un bilan critique de la Loi de finances 2026. Au micro de Hatem Ben Amara dans l’émission Sbeh El Ward sur Jawhara FM, il pointe l’insuffisance des mesures, le poids fiscal sur les entreprises et la nécessité d’un cadre législatif stable, tout en appelant à des réformes fiscales structurelles pour soutenir la croissance et la justice sociale.
Un projet de Loi de finances insuffisant pour le citoyen et l’entreprise
Pour M. Bounenni, la version actuelle du projet de Loi de finances 2026 présente « peu de mesures concrètes pour renforcer la justice fiscale et l’action sociale de l’État ». Il estime que plusieurs dispositions sont de nature procédurale et ne constituent pas de véritables avancées pour l’économie ou le citoyen. Certaines mesures, comme les augmentations salariales dans le secteur public et privé, ne relèvent pas réellement de la Loi de finances, mais d’ordres spécifiques, limitant leur portée et leur applicabilité. La multiplicité des propositions de modification par les députés (environ 155) a créé des divergences importantes avec la version initiale, générant un flou sur leur mise en œuvre effective.
Amnistie fiscale et TVA : des mesures ponctuelles mais limitées
Parmi les mesures phares, l’amnistie fiscale permet aux entreprises ayant des déclarations fiscales en retard jusqu’au 31 octobre 2025 de régulariser leur situation jusqu’au 30 septembre 2026, avec possibilité d’étaler le paiement des dettes fiscales. Cette initiative vise à alléger la pression financière sur les entreprises et à les inciter à se mettre en conformité. Toutefois, M. Bounenni précise que son efficacité dépend de la sincérité et de la capacité financière des contribuables et qu’elle ne remplace pas une réforme structurelle du système fiscal.
Concernant la TVA, le vice-président du CCT explique que la taxe est due mensuellement sur les paiements effectivement encaissés, ce qui peut créer un déséquilibre pour les entreprises. Il propose une révision des mécanismes de collecte afin de réduire le poids fiscal et d’encourager la conformité, notamment pour les professions libérales et les petites structures.
Impôts sur la fortune et mesures controversées : rendement limité attendu
Houssem Bounenni souligne qu’il ne croit pas que le nouvel impôt sur la fortune engendrera des revenus importants. À titre d’exemple, l’impôt sur la fortune immobilière n’a rapporté que onze millions de dinars, montrant que ce type de mesure reste marginal pour les finances publiques.
D’autres dispositions du projet, comme la voiture familiale ou les facilités accordées par le Banque Centrale, posent des questions d’équité et de faisabilité pratique. Le comptable souligne que certaines mesures nécessitent une coordination entre plusieurs ministères et qu’elles peuvent générer des ambiguïtés ou des obstacles logistiques.
La réforme fiscale et la stabilité législative : priorités pour la Tunisie
Pour M. Bounenni, la Tunisie a besoin d’un cadre fiscal stable et prévisible, permettant aux entreprises et aux citoyens de planifier leurs activités et de respecter leurs obligations fiscales. La multiplication des amnisties et des modifications annuelles crée de l’incertitude et freine l’investissement.
« Nous avons besoin d’un système où les textes fiscaux sont clairs, stables et appliqués de manière cohérente », insiste-t-il. Selon lui, les mesures ponctuelles comme les amnisties ou certaines exonérations peuvent constituer des solutions temporaires, mais seules des réformes structurelles profondes permettront de sécuriser la fiscalité, alléger la charge sur les entreprises et assurer l’équité pour tous.
I.N.










