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S’asseoir avec un trafiquant de drogue est-il un crime puni de prison ?

Une publication largement relayée sur les réseaux sociaux affirme que « s’asseoir avec un trafiquant de drogue dans une maison ou un local constitue un crime puni par la loi de 17 mois à deux ans de prison ». Présentée comme une disposition claire du droit tunisien, cette affirmation suscite inquiétude et confusion. Vérification faite, elle ne correspond pas au cadre légal en vigueur.

En droit tunisien, la matière des stupéfiants est principalement régie par la loi n°92-52 du 18 mai 1992. Ce texte réprime de manière sévère la production, la détention, la consommation, le transport, la distribution et la facilitation de l’usage de stupéfiants. En revanche, il ne prévoit pas de sanction pénale pour le simple fait d’être assis en présence d’un trafiquant, que ce soit dans un domicile ou un local commercial. Pour qu’une infraction soit constituée, la loi exige des éléments matériels précis : participation à l’infraction, aide ou assistance, dissimulation, mise à disposition d’un lieu en connaissance de cause, ou encore consommation ou détention de substances interdites.

Autrement dit, la simple présence passive, sans preuve d’intention criminelle ni d’acte de complicité, ne suffit pas à caractériser un délit. En droit pénal tunisien, comme dans la plupart des systèmes juridiques, la responsabilité pénale est personnelle. Elle ne peut être engagée que si l’on démontre un comportement répréhensible clairement défini par la loi. L’idée d’une peine automatique de « 17 mois à deux ans » pour le simple fait de s’asseoir avec une personne soupçonnée ou reconnue comme trafiquant ne repose sur aucun article identifiable de la législation tunisienne.

Qu’en est-il à l’échelle internationale ? Là encore, les comparaisons confirment le caractère trompeur de l’affirmation. Dans la majorité des pays, la simple fréquentation ou présence auprès d’un trafiquant de drogue n’est pas pénalement sanctionnée en tant que telle. Les législations visent des actes précis, association de malfaiteurs, complicité, recel, facilitation ou non-dénonciation dans des cas très encadrés. Même dans des pays aux politiques antidrogue strictes, la condamnation suppose la preuve d’une participation active ou d’une intention criminelle, et non une simple proximité physique ou relationnelle.

Cette rumeur semble donc résulter d’une confusion fréquente entre la notion de complicité et la simple présence. Elle peut aussi être alimentée par des interprétations abusives de certaines affaires judiciaires où des personnes présentes sur les lieux ont été poursuivies, non pas pour s’être « assises avec » un trafiquant, mais parce que l’enquête a établi leur implication ou leur aide.

Ainsi, aucune disposition du droit tunisien ne criminalise le simple fait de s’asseoir avec un trafiquant de drogue, et aucune loi connue à l’international ne prévoit une peine de prison automatique pour un tel comportement en l’absence d’actes de complicité. L’information qui circule sur les réseaux sociaux est donc trompeuse et ne reflète ni la lettre ni l’esprit de la loi.

R.A.

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