Une vidéo diffusée sur TikTok affirme que le président Kaïs Saïed aurait ordonné le déploiement de plus de 90 navires de guerre tunisiens le long des côtes après l’incident de Sidi Bou Saïd. La séquence, qui montre le patrouilleur hauturier P611, est présentée comme la preuve de cette mobilisation. Pourtant, cette interprétation est trompeuse.

La vidéo en question n’a rien à voir avec un déploiement militaire récent. Elle correspond à un événement organisé en 2016 par le ministère tunisien de la Défense nationale à l’occasion du 60ᵉ anniversaire de la création de la marine tunisienne. Pour la première fois dans l’histoire du pays, un grand défilé naval avait été organisé au large de Tunis, réunissant plus de 15 navires de guerre. Mais la majorité de ces bâtiments provenaient de marines étrangères invitées dans le cadre de la coopération « 5+5 Défense » et d’autres accords bilatéraux.

Parmi les navires présents figuraient, du côté tunisien, la corvette Sfax, le patrouilleur lance-missiles Carthage et le patrouilleur rapide Hannibal. Ils étaient accompagnés de bâtiments étrangers tels que la frégate Rais Korso (Algérie), le bâtiment de soutien Loire (France), la frégate Alpino (Italie), le navire de débarquement Ibn Auf (Libye), la corvette Bir Anzaran (Maroc), la corvette Douro (Portugal), la corvette Serviola (Espagne), le navire hydrographique HMS Echo (Royaume-Uni), la frégate HS Elli (Grèce), la frégate lance-missiles Wuhan (Chine) ou encore le destroyer USS Ross (États-Unis).
L’événement filmé était donc une cérémonie commémorative exceptionnelle, et non une décision récente de déployer 90 navires tunisiens. La marine nationale ne dispose pas d’une telle flotte, son inventaire étant limité à une quarantaine d’unités, essentiellement des patrouilleurs côtiers.
Pour rappel, en septembre 2025, deux attaques distinctes ont visé des navires de la flottille internationale Global Sumud, amarrés au port de Sidi Bou Saïd. La première est survenue dans la nuit du 8 au 9 septembre, lorsqu’une explosion suivie d’un incendie a touché le Family Boat, navire phare de la mission.
Les organisateurs ont dénoncé une attaque par drone, tandis que les autorités tunisiennes ont d’abord évoqué un incident accidentel, sans faire état de blessés mais avec des dégâts matériels visibles. La seconde attaque a eu lieu la nuit suivante, du 9 au 10 septembre, cette fois contre le navire Alma, battant pavillon britannique. Selon les militants, un engin incendiaire largué par un drone a provoqué un feu rapidement maîtrisé sur le pont supérieur, là encore sans victimes. Les autorités tunisiennes ont qualifié cette seconde attaque d’acte prémédité et annoncé l’ouverture d’une enquête.
R.A.