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Tanzanie – Investiture de Samia Suluhu Hassan sur fond de répression sanglante

GIUSEPPE CACACE / AFP

Samia Suluhu Hassan a été investie lundi 3 novembre 2025 présidente de la Tanzanie, malgré les violences électorales ayant fait des centaines de morts selon l’opposition et un scrutin critiqué pour son grand manque de transparence, les autorités ayant aussi bloqué internet.

Mme Hassan avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de son prédécesseur John Magufuli en 2021. Saluée dans un premier temps pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a ensuite été accusée de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

« Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (…) avec diligence et un cœur sincère », a affirmé la cheffe de l’État, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir.

La cérémonie, non ouverte au public contrairement aux précédentes, s’est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés peinaient à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé avant l’arrivée de la cheffe de l’État, pour chanter les louanges de « Mama Samia », son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66 % des suffrages. L’élection a été qualifiée de « parodie de démocratie » par l’opposition, dont les deux principaux dirigeants ont été soit emprisonnés, soit disqualifiés.

L’opposition a également dénoncé d’importantes fraudes le jour du scrutin, mais aussi le taux de participation revendiqué : 87 % de votants selon la commission électorale, alors que l’AFP et plusieurs observateurs ont constaté une faible affluence.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, les manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie placée sous cloche : l’internet reste coupé depuis mercredi, ralentissant considérablement la diffusion d’informations.

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d’hommes en uniforme tirant à balles réelles, commencent à circuler sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l’AFP a pu vérifier que certaines de ces images n’avaient jamais été publiées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu’elles ont bien été prises en Tanzanie.

Opposants traqués

Un porte-parole du principal parti d’opposition, Chadema, a estimé vendredi qu’au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre jugé crédible par une source sécuritaire, évoquant « des centaines de morts ».

Le lendemain, ce même porte-parole, John Kitoka, a évoqué « au moins 800 tués ».

Des informations crédibles laissent penser que des centaines, voire des milliers de personnes auraient péri lors des violences électorales, selon une source diplomatique interrogée par l’AFP.

D’après des « rapports préoccupants », la police utiliserait également le blocage d’internet pour « traquer les membres de l’opposition et les manifestants qui pourraient détenir des vidéos » des exactions, a ajouté cette source.

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics sont à l’arrêt. Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier « pour la Tanzanie » et évoqué les « nombreuses victimes » des affrontements post-électoraux.

L’élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Les autorités tanzaniennes nient toute violence. « Il n’y a eu aucun usage excessif de la force », a affirmé le ministre des Affaires étrangères Mahmoud Thabit Kombo. « Je n’ai pas vu ces 700 morts ».

Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une « enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d’utilisation excessive de la force ».

Chadema, exclu des élections, avait appelé au boycott du scrutin. Son chef, Tundu Lissu, arrêté en avril, est jugé pour trahison, une accusation passible de la peine capitale. Luhaga Mpina, candidat à la présidentielle du parti ACT Wazalendo, a lui aussi été disqualifié.

Amnesty International avait dénoncé une « vague de terreur » marquée par « des disparitions forcées, des arrestations arbitraires, des actes de torture et (…) des exécutions extrajudiciaires » avant le scrutin.

© Agence France-Presse

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