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Importation de véhicules au tarif d’origine : ce qu’il faut savoir

Par Nadya Jennene

L’initiative législative relative à l’importation de véhicules au tarif d’origine a provoqué, samedi 29 novembre 2025, une agitation rare dans les travées du Parlement. Sous une atmosphère électrique et un désordre nourri, le texte a néanmoins réussi à franchir l’étape décisive de l’adoption.

Ce dispositif, octroyé une seule fois dans la vie, vise à faciliter l’accès des ménages à un véhicule tout en encadrant strictement les conditions d’éligibilité.

Selon le texte, l’avantage est réservé à la famille résidente, définie comme le couple, leurs enfants mineurs ou, en cas de divorce ou de décès, la personne assumant la qualité de chef de famille. Le véhicule acquis ne doit pas dépasser huit ans d’âge.

L’amendement fixe une fiscalité réduite pour les voitures thermiques à faible cylindrée : 10% de droit de consommation pour les moteurs diesel jusqu’à 1700 cm³ et essence jusqu’à 1400 cm³, assortis d’une TVA limitée à 7%. Les véhicules électriques, hybrides ainsi que ceux de fabrication tunisienne sont, eux, exemptés de droit de consommation.

Le texte introduit également des conditions de revenus : le revenu brut ne doit pas dépasser dix fois le SMIG pour un individu et quatorze fois le SMIG pour un couple. En outre, la cession du véhicule est interdite durant les cinq premières années, une mention obligatoire devant figurer sur la carte grise.

L’amendement interdit par ailleurs le cumul de deux avantages fiscaux liés à l’achat de voitures et impose qu’au moins 10% du total annuel des importations autorisées soient réservés aux bénéficiaires de ce régime.

Le dispositif mobilise plusieurs mécanismes financiers, notamment la procédure de donation des Tunisiens à l’étranger, l’allocation touristique et l’autorisation d’achat de devises pour l’acquisition du véhicule.

L’allocation touristique est, rappelons-le, plafonnée à l’équivalent de 6.000 dinars en devises étrangères par personne et par année civile. Or, selon les dernières statistiques publiées par La Centrale, le prix moyen des véhicules d’occasion en France est repassé, en 2025, sous le seuil des 20.000 euros. La même dynamique se vérifie pour les modèles 100 % électriques, tandis que les hybrides enregistrent, eux, une baisse de leur prix moyen en dessous de 30.000 euros.

Parallèlement, une analyse exhaustive du marché européen de l’occasion, conduite par le Centre commun de recherche (CCR) de la Commission européenne, établit que la majorité des véhicules échangés au sein de l’Union européenne ont un âge compris entre huit et quinze ans. L’étude relève en outre que les modèles diesel anciens y demeurent prédominants, particulièrement dans les pays d’Europe centrale et orientale, où ils continuent de constituer la base essentielle du parc automobile.

La mise en œuvre de l’initiative législative sera, selon le texte adopté, assurée conjointement par les ministères des Finances et du Commerce, dans un délai maximal de six mois suivant l’entrée en vigueur de la loi. 

Les demandes complètes devront recevoir une réponse écrite dans un délai de trois mois, et le bénéficiaire disposera de deux ans pour concrétiser l’achat après obtention de l’accord définitif, faute de quoi il devra déposer une nouvelle demande.

Ce texte a été présenté par ses promoteurs comme une mesure d’allégement destinée à soutenir les Tunisiens dont le pouvoir d’achat s’est profondément érodé sous l’effet conjugué de l’inflation persistante, de la dépréciation du dinar et de la dégradation manifeste des services de transport public. 

Pour ses défenseurs, l’initiative se veut ainsi une réponse pragmatique à une réalité socio-économique pesante : offrir aux ménages une possibilité d’accès à un véhicule à un coût plus abordable, dans un contexte où les mobilités quotidiennes deviennent de plus en plus précaires et où la pression financière sur les familles atteint un seuil critique.

Or, en dépit de ces intentions affichées et de la portée sociale de cette initiative, le ministère des Finances a estimé que le dispositif demeurait, en l’état, inapplicable. La tutelle a opposé de sérieuses réserves, tant sur le plan juridique que sur le plan macroéconomique, soulignant que la mesure contrevenait au cadre réglementaire régissant les changes, menaçait l’équilibre déjà fragile des réserves en devises et risquait d’entraîner des effets collatéraux lourds, notamment sur la balance des paiements et sur la structure du parc automobile national. 

Prenant la parole avant le vote au Parlement, la ministre des Finances, Michket Slama Khaldi, a noté que le cadre juridique actuellement en vigueur ne permettait en aucun cas aux particuliers tunisiens d’importer librement des véhicules. Une telle opération demeure strictement encadrée par un ensemble dense de textes réglementaires, dominés par la législation des changes, dont les dispositions s’imposent avec une rigueur absolue.

Elle a, à cet égard, insisté sur la nécessité impérieuse de préserver les réserves nationales en devises, un capital stratégique dans un contexte économique marqué par une fragilité aiguë et des tensions persistantes sur la balance des paiements.

Si elle a reconnu que « l’intention du texte est, dans son essence, parfaitement louable », la ministre a néanmoins tenu à souligner les limites structurelles et financières de sa mise en œuvre. « C’est une belle proposition… mais à quel prix ? », a-t-elle interrogé, ouvrant un faisceau de questions fondamentales : la faisabilité des mécanismes d’importation, les modalités de financement, l’impact prévisible sur les équilibres macroéconomiques, ainsi que la capacité réelle de l’État à absorber les coûts induits.

« Comment allons-nous mobiliser les devises nécessaires, et comment les fournir ? », a-t-elle poursuivi, rappelant que, dans son rôle de gestionnaire des finances publiques, elle se devait de privilégier l’allocation des ressources en devises aux importations vitales : énergie, céréales, produits subventionnés.

Aussi, détourner une partie de ces réserves limitées pour financer l’acquisition de véhicules lui semble, a-t-elle dit, difficilement justifiable au regard des priorités nationales.

La ministre a par ailleurs alerté sur les risques d’une importation massive de véhicules d’occasion, tant du point de vue de la maintenance – susceptible de générer des coûts élevés pour les ménages – que de l’impact environnemental, redoutant un alourdissement supplémentaire d’un parc automobile déjà vieillissant et polluant.

Elle a finalement conclu, sans équivoque, que la proposition, en l’état, ne pouvait être considérée comme « applicable », appelant implicitement à une révision profonde du dispositif pour en assurer la cohérence économique et la soutenabilité financière.

N.J

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Commentaire

  1. Mhammed Ben Hassine

    1 décembre 2025 | 10h39

    Bn
    Laissant de côté l’option d’importation qui pose un énorme problème sans solutions
    Prenant le cas local
    Comment un personne illigible aux conditions peut il acheter une voiture neuve au prix d’origine et auprès de qui.
    Un concetionaire Peugeot par exemple va t il me vendre in voiture exonérer des frais qu’il a supportés
    Une explication de taille