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Le barreau de Tunis se révolte et annonce d’importantes décisions

Par Raouf Ben Hédi

Le Conseil de l’Ordre régional des avocats de Tunis a tenu, mercredi 3 décembre 2025, une réunion d’urgence au siège du barreau, au Palais de justice de Bab Bnet. Cette convocation exceptionnelle intervient dans le contexte des vives inquiétudes suscitées par les verdicts rendus dans l’affaire dite de « complot contre la sûreté de l’État », ainsi que par les mesures exécutées à une vitesse jugée « record », notamment contre l’avocat et militant Ayachi Hammami.

Selon le communiqué publié à l’issue de la réunion, le conseil, dont le président et plusieurs membres ont assisté aux différentes phases du procès, affirme avoir constaté des décisions et des procédures portant « atteinte au cœur du droit de la défense ». Il souligne également que le verdict contre Me Hammami a été exécuté mardi soir à une cadence « inédite », et ce malgré l’existence d’une demande officielle de suspension d’exécution et avant l’expiration des délais légaux du pourvoi en cassation.

Un comité spécial dédié au suivi du dossier Hammami

Le Conseil a annoncé la création d’un comité spécial composé d’avocats expérimentés et de membres du barreau. Cette structure sera chargée du suivi du dossier d’Ayachi Hammami sous ses aspects juridique, procédural, humain et médiatique.

Parmi ses missions :

  • surveiller en permanence l’état de santé de l’avocat, actuellement en grève de la faim depuis son arrestation ;
  • suivre l’évolution du dossier judiciaire et les communications officielles ;
  • coordonner avec le comité de défense, la famille et toutes les parties concernées ;
  • établir des rapports périodiques soumis au Conseil du barreau et publiés, le cas échéant, à l’attention de la profession ;
  • documenter toutes les irrégularités ou violations accompagnant l’exécution du jugement.
Boycott des chambres pénales où des « violations graves » ont été constatées

Le Conseil du barreau de Tunis a également décidé de boycotter plusieurs chambres pénales dont les audiences ont, selon lui, été entachées de « violations flagrantes » compromettant les garanties d’un procès équitable.

Sont concernées, les chambres criminelles de première instance n° 2, 4, 5 et 44 et les chambres criminelles d’appel n° 23 et 27.

Le boycott s’étendra sur tout le mois de décembre 2025, à partir du lundi 8 décembre, dans une première phase avant une possible décision de boycott définitif.

Le barreau annonce par ailleurs la création d’un registre spécial où seront consignés tous les signalements relatifs aux irrégularités procédurales, ainsi que l’identité des auteurs présumés. Ces signalements seront transmis aux autorités compétentes pour les suites nécessaires.

Un rassemblement général des avocats le 4 décembre

Le barreau de Tunis invite l’ensemble des avocats et avocates du ressort à un grand rassemblement général jeudi 4 décembre 2025 à partir de 11h, à la Maison de l’avocat. L’objectif : présenter les derniers développements, détailler les mesures prises, et définir une vision commune pour les actions professionnelles à venir.

Vers une coordination nationale du corps des avocats

Le Conseil a également mandaté son président pour adresser une correspondance au bâtonnier de l’Ordre national des avocats de Tunisie, l’appelant à convoquer dans les plus brefs délais une conférence nationale des conseils régionaux.

Cette réunion devrait permettre d’élaborer un plan d’action unifié, face aux évolutions judiciaires préoccupantes, et de renforcer la défense des droits de la défense, de la profession et des principes du procès équitable.

Le communiqué se conclut par un appel solennel aux avocates et avocats du barreau de Tunis à rester soudés, à préserver l’unité de la profession et à défendre son indépendance comme la dignité de ses membres.

Une arrestation qui provoque un tollé

L’avocat et militant des droits humains Ayachi Hammami a été arrêté, mardi 2 décembre 2025, à son domicile. Il faisait l’objet d’un jugement en appel dans le cadre de l’affaire dite de « complot contre la sûreté de l’État ». La Cour d’appel l’avait condamné à cinq ans de prison – assortis de deux ans de surveillance administrative – contre huit ans en première instance.

Figure historique du militantisme démocratique, ancien coordinateur du Comité national de défense des détenus politiques, Ayachi Hammami est reconnu pour son engagement constant en faveur des libertés et des droits fondamentaux. Il avait toujours dénoncé une affaire « montée de toutes pièces », à caractère éminemment politique.

Son arrestation, exécutée dans un climat de fortes tensions entre les autorités et de nombreux acteurs de la société civile, a suscité un large tollé. Plusieurs ONG, avocats, universitaires et personnalités publiques y voient un nouveau signe de la dérive répressive du pouvoir et une atteinte directe au droit de défendre et à la liberté d’expression.

Une mobilisation qui s’étend : Gafsa, Sousse et d’autres barreaux en ordre de bataille

Le mouvement de protestation ne se limite plus au barreau de Tunis. À Gafsa, le Conseil de l’Ordre régional des avocats, réuni en urgence ce mercredi 3 décembre 2025, a dénoncé un jugement « dépourvu des conditions minimales d’un procès équitable » et inscrit, selon lui, dans une stratégie visant à « museler les voix dissidentes, qu’elles soient celles d’avocats, de défenseurs des droits humains, de journalistes ou d’acteurs politiques ».

Le barreau de Gafsa alerte en outre contre la « politisation de la justice » et la criminalisation croissante de l’opinion. Il exprime son soutien total et inconditionnel à Ayachi Hammami, tout en tenant les autorités responsables de son intégrité physique alors qu’il entame une grève de la faim. Le Conseil régional a également annoncé une grande protestation devant le tribunal de première instance de Gafsa, jeudi 4 décembre à 9h30, appelant tous les avocats de la région à y participer.

À Sousse, ainsi que dans d’autres barreaux régionaux, des réunions d’urgence se tiennent également, et plusieurs conseils envisagent – ou ont déjà décidé – des actions de protestation et de mobilisation. Partout, la profession s’organise, dénonçant des dérives judiciaires jugées graves et réaffirmant la nécessité de défendre les garanties fondamentales du procès équitable.

R.B.H

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Commentaire

  1. Roberto Di Camerino

    3 décembre 2025 | 23h18

    J’ACCUSE…..
    L’EMIR DE ZAKAFOUN…