La mobilisation citoyenne se poursuit et gagne en ampleur. Pour la quatrième fois consécutive en moins d’un mois, des organisations de la société civile et plusieurs formations politiques ont investi, samedi 13 décembre 2025, les rues de la Capitale afin de défendre les libertés publiques et exiger la cessation des atteintes répétées aux droits fondamentaux en Tunisie.
Sous le slogan « Les chaînes se briseront », emprunté à un vers de l’hymne national, la marche a débuté à 15 heures devant le siège du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), sur l’avenue des États-Unis, avant de s’ébranler en direction de la place de l’Indépendance, à hauteur de la statue d’Ibn Khaldoun.

Parmi les organisations à l’origine de cette mobilisation figurent la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH), qui a exhorté ses membres, sympathisants et l’ensemble des citoyennes et citoyens à participer massivement à cette marche, l’Association tunisienne des femmes démocrates, l’Ordre national des avocats tunisiens, le Forum tunisien des droits économiques et sociaux.
En tête du cortège, plusieurs figures emblématiques de la défense des libertés publiques ont marqué leur présence. Le président du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), Zied Dabbar, a pris place en première ligne aux côtés de Bassem Trifi, président de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, et de Chokri Latif, représentant de l’Organisation contre la torture en Tunisie (OCTT).


Cette marche s’inscrit, rappelons-le, dans un climat de contestation persistante, marqué par une multiplication des rassemblements ces dernières semaines. Militants des droits humains, avocats, journalistes, syndicalistes, universitaires et citoyens non affiliés y expriment leur rejet de la dérive autoritaire du pouvoir et de la vague d’arrestations et de condamnations visant des figures politiques, syndicales et associatives, souvent poursuivies en raison de leurs opinions ou de leur engagement public.
Loin de s’essouffler, ce mouvement apparaît désormais comme un baromètre de la résistance démocratique, traduisant un ras-le-bol croissant face à la fermeture de l’espace public et à la criminalisation de l’expression critique.

Les slogans scandés tout au long de la marche traduisent d’ailleurs avec force ce climat de colère et de défiance qui anime les manifestants. Les participants ont dénoncé une « justice aux ordres » accusée de remplir les prisons sur instruction politique, tout en réaffirmant leur détermination à poursuivre la lutte jusqu’à la chute du régime.
Les appels à la liberté ont résonné également à travers le rejet explicite de l’État policier, jugé incompatible avec les aspirations démocratiques du pays. Plusieurs slogans visaient directement le président de la République, Kaïs Saïed, décrit comme un « chef d’État en échec gouvernant par la contrainte sécuritaire, tandis que d’autres ont fustigé des années perçues comme perdues, consacrées à masquer l’échec plutôt qu’à y remédier.

« Remplissez les prisons, ô justice aux ordres. », « Nous poursuivrons la lutte jusqu’à la chute du régime. », « Libertés, libertés : l’État policier n’a plus sa place. », « Un président en échec gouverne par la force policière. », « En sept, il n’a fait que restaurer une piscine », ont scandé les 2 000 manifestants présents.
À travers cette nouvelle mobilisation, la société civile tunisienne entend réaffirmer son attachement aux libertés, à l’État de droit et aux principes démocratiques, dans un contexte politique jugé de plus en plus restrictif.
N.J













3 commentaires
Larry
» Ce que le peuple veut »
Alors que fait notre endormi de KS ?…
Tunisino
Oui, une marche pour défendre les libertés, organisée par le SNJT, la LTDH, et la OCTT, c’est bien. Mais quand le SNJT, la LTDH, et la OCTT organisent-ils une marche pour défendre le développement, responsable de la qualité de vie des sinistrés tunisiens, de tous les temps? Quand les littéraires politisés passent-ils de la réaction (passé) à l’action (futur)? Quand les littéraires politisés couplent-ils libertés et développement? Pourquoi la Tunisie n’a jamais réussi à prendre les rails du progrès durable (technique et démocratique)? Tout simplement car les littéraires politisés sont limités, ils sont incapables de travailler sur et les libertés et le développement à la fois, il arrive même que les deux volets sont bafoués à la fois, comme c’est le cas actuellement.
jamel.tazarki
Introduction : il est important de réclamer les droits et les libertés, mais il ne faut pas non plus négliger de réclamer un État de droit et les garanties constitutionnelles qui les protègent contre les abus de pouvoir. Sinon, nous risquons de remplacer une dictature par une autre!
–>
Il est temps d’éclairer le peuple tunisien, quel que soit son niveau d’éducation, sur l’importance des garanties constitutionnelles pour nous protéger contre les abus de pouvoir.
–>
Non, je ne bougerai pas le petit doigt pour remplacer une dictature par une autre. En revanche, je soutiendrai un mouvement en faveur d’un État de droit et de garanties constitutionnelles pour nous protéger contre les abus de pouvoir.
–>
Depuis l’indépendance de la Tunisie, aucun juriste ni homme politique n’a songé à nous accorder un État de droit et des garanties constitutionnelles pour nous protéger des abus de pouvoir. Nous sommes passés d’une dictature à une autre, et c’est le peuple qui a payé les pots cassés.
– Je donne quelques exemples de garanties constitutionnelles contre les abus de pouvoir:
– a1) un Conseil supérieur de la magistrature (CSM) dont les membres sont élus par les magistrats eux-mêmes et non nommés par le président de la République ;
– a2) une Cour constitutionnelle dont quatre membres sont élus par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), quatre autres sont nommés par le président de la République et quatre autres sont élus par le Parlement ;
–>
– une loi électorale et une constitution intelligentes, justes, non dictées par un clan, efficaces contre les fraudes, ainsi qu’un CSM dont les membres sont élus et non nommés par le président de la République.
a3) La hiérarchie des normes (ou « pyramide du droit »). Je rappelle que, dans les pays démocratiques, la hiérarchie des textes est la suivante :
1) la Constitution, protégée par la Cour constitutionnelle ;
2) les lois ;
3) les décrets et les arrêtés ;
4) les circulaires.
–>
Or, en Tunisie, cette hiérarchie n’est pas respectée, comme en témoigne la déformation de la loi électorale (« amendement ») à quelques jours de la récente élection présidentielle. De plus, les décrets et arrêtés sont souvent en contradiction avec la constitution de KS.
– a4) une justice indépendante, avec un CSM élu ;
a5) Contrôle de constitutionnalité : par une Cour constitutionnelle, afin de vérifier la conformité des lois à la Constitution avant leur promulgation, et ainsi protéger les droits fondamentaux. Mais pour cela, il nous faudrait une constitution intelligente, et non dictée par un clan.
– a6) Libertés fondamentales : droit à la vie, à la sécurité, à la vie privée, liberté d’expression, de pensée, de conscience, de religion, d’association, etc.
a7) Les magistrats de la Cour de cassation, qu’ils soient conseillers ou présidents, sont nommés sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature (CSM).
– a8) Égalité devant la loi : principe selon lequel tous les citoyens sont soumis aux mêmes lois.
– a9) Interdiction de l’arbitraire : l’État ne peut pas agir de manière subjective ou inéquitable.
– a10) Nécessité d’un CSM élu et d’une Cour constitutionnelle (voir ci-dessus).
Conclusion : il est important de réclamer les droits et les libertés, mais il ne faut pas non plus négliger de réclamer un État de droit et les garanties constitutionnelles qui les protègent contre les abus de pouvoir. Sinon, nous risquons de remplacer une dictature par une autre!
Dr. Jamel Tazarki, Mathématicien