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Mohamed Abbou fustige Kaïs Saïed : « Le prétendu mandat du 17 décembre met la Tunisie en danger »

Par Nadya Jennene

L’ancien ministre, Mohamed Abbou, a publié, jeudi 25 décembre 2025, sur sa page Facebook une critique virulente et alarmiste à l’égard du président de la République, Kaïs Saïed, à la suite de son dernier discours. Dans un message empreint d’inquiétude pour l’avenir du pays, M. Abbou a dénoncé une interprétation erronée et dangereuse du mandat populaire dont le président se croit investi. 

« Le président disparaît de la scène publique pendant six jours, dans un contexte marqué par l’absence de la Cour constitutionnelle et de toute solution constitutionnelle claire en cas de malheur le concernant, et ce, sans la moindre transparence sur son état de santé. Lors de sa première apparition après cette période, il proclame la nécessité de passer à la ‘vitesse maximale’ dans tous les domaines, invoquant un prétendu mandat populaire obtenu le 17 décembre. Il ne ment ni ne se déguise : il croit réellement que le peuple lui a confié ce mandat le 17 décembre, et c’est là que réside le danger pour notre pays et son avenir ! », a-t-il écrit. 

Une légitimation fondée sur des « illusions numériques »

Selon Mohamed Abbou, cette perception erronée de la volonté citoyenne constitue un véritable danger, car elle légitime des actions politiques fondées sur des illusions numériques et non sur un réel consensus démocratique. « Indépendamment de l’usage des moyens de l’État, des financements douteux et des bus mobilisés, supposons que le nombre de participants à une manifestation de soutien soit de trois mille, et, par précaution, ajoutons-y mille personnes supplémentaires que nous n’avons pas remarquées : comment pourrait-il alors prétendre à un mandat populaire ? Autrement dit, si l’opposition parvenait à rassembler cinq mille manifestants, pourrait-elle alors revendiquer un mandat populaire pour le destituer ? »

Mohamed Abbou a aussi fustigé les conséquences de ces illusions sur la vie nationale : incarcérations massives, déstabilisation économique et financière, propagation d’un climat de haine et de divisions au sein de la société tunisienne. Il a critiqué en outre le rôle passif, parfois opportuniste, de certains responsables et associations, qui se contentent, à son sens, d’observer et de théoriser la défense de la démocratie, tout en attendant un « salut providentiel » plutôt que d’agir concrètement.

« Ce qui se passe n’est vraiment pas digne de la Tunisie. Ce que font M. Kaïs Saïed, le reste des responsables de l’État, ainsi qu’une opposition devenue associations de défense des droits, est indigne. Certains observent en silence, calculent leurs mouvements, attendent une solution venue du ciel et, dans l’intervalle, effectuent des gesticulations pour présenter leur narratif de défense de la démocratie si le ciel y répond, alors même que cela n’est pas approprié et a un précédent historique dans notre pays », a-t-il affirmé. 

Pour Mohamed Abbou, la Tunisie, héritière d’une révolution ayant conquis la liberté, se trouve aujourd’hui menacée par des dérives autoritaires et populistes : « Ne sommes-nous pas le même peuple qui s’est libéré, puis a outrepassé toutes les limites de la liberté après la révolution, au point de la transformer en chaos ? Pourquoi ce silence ? », s’est-il interrogé. 

Le 17 décembre au cœur de la controverse

Le 17 décembre 2025, à l’occasion de la célébration du 15e anniversaire de la Révolution, près de 3.500 soutiens du président de la République se sont rassemblés devant le Théâtre municipal dans le centre-ville de Tunis scandant un appui indéfectible pour Kaïs Saïed. 

Au lendemain de cette manifestation, le président de la République a reçu la cheffe du gouvernement, Sarra Zaâfrani Zenzri, au palais de Carthage, pour évoquer cette mobilisation la qualifiant de « moment historique ». Il a alors avancé que le peuple tunisien avait transmis « un message clair et sans ambiguïté », témoignant d’une « conscience élevée et d’une compréhension approfondie des enjeux nationaux ». 

Le chef de l’État a réaffirmé la nécessité de poursuivre « la voie tracée par le peuple » et de garantir la souveraineté nationale, tout en soulignant le caractère légitime de la reddition des comptes face aux injustices et au pillage des ressources. Il a rappelé aussi que « la voix du peuple » demeure la seule référence, assurant que le pouvoir ne se réduit ni à des privilèges ni à des fonctions.

Depuis cette rencontre, le locataire de Carthage s’est tenu à l’écart de la scène publique, avant de réapparaître le mercredi 24 décembre, reprenant le même discours. Il a à nouveau reçu la cheffe du gouvernement et souligné la nécessité de passer à la « vitesse maximale » dans tous les domaines, s’appuyant sur le mandat populaire exprimé le 17 décembre.

Kaïs Saïed a affirmé que les Tunisiennes et les Tunisiens, rassemblés à Tunis et dans toutes les régions, avaient adressé un signal clair et historique face aux complots contre la nation. Selon lui, aucune place ne peut être laissée à la déception des attentes populaires ni à une gestion fragmentée des crises. Le président a insisté sur l’importance de l’action concrète, sur le terrain, pour traduire les objectifs de la révolution : emploi, liberté et dignité nationale. Il a enfin mis en avant la conscience nationale du peuple, véritable rempart contre toute manœuvre ou hypocrisie.

N.J

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2 commentaires

  1. Citoyen_H

    26 décembre 2025 | 15h24

    INLASSABLEMENT,
    Abbou, formidable girouette dotée d’une technologie très avancée, ne veut décidément pas lâcher prise.
    Il est hanté et traumatisé par ses lamentables échecs, malgré toutes ses pirouettes effectuées, dès les premiers instants qui suivirent son parachutage, l’année 2011.
    Mauvais perdant, il occupe, incontestablement, les trois premières marches du podium de l’équipe des saltimbanques post-2011 qui rabaissèrent la notoriété du pouvoir central au simple titre d’une lamentable farce.
    S’il maintient cette vitesse de croisière, cet adepte des potins, file, droit, vers des chemins non balisés !!!

  2. HatemC

    25 décembre 2025 | 14h41

    Quand Mohamed Abbou parle aujourd’hui de “dérives autoritaires”, il oublie commodément le bilan de ceux qui ont gouverné après 2011.
    Le CPR, Ennahdha et Ettakatol n’ont pas construit une démocratie solide : ils ont confisqué la révolution, occupé l’État, neutralisé les réformes structurelles et remplacé Ben Ali par eux-mêmes.

    Qu’ont-ils réellement changé ?
    – Pas de réforme profonde de la justice
    – Pas de refonte de l’administration
    – Pas de vision économique
    – Pas de lutte sérieuse contre la corruption systémique

    La révolution n’a pas été institutionnalisée, elle a été phagocytée.
    Le slogan implicite n’était pas “liberté et démocratie”, mais : “POUSSE-TOI DE LA QUE JE M’Y METTE”.

    Dès lors, voir aujourd’hui ces mêmes acteurs se poser en gardiens moraux de la démocratie relève moins du courage que de l’amnésie politique.
    La dérive autoritaire actuelle ne tombe pas du ciel : elle est aussi le produit de leur échec, de leur amateurisme et de leur incapacité à bâtir un État de droit crédible.

    Kaïs Saïed est un problème, un putain de problème.
    Mais ceux qui ont vidé la révolution de son contenu le sont tout autant…. HC